Symbolisme musical et art total

C’est avec beaucoup d’émotion que Martine Boulfroy nous a invités à pénétrer dans l’univers musical de la fin du XIXème et du début du XXème siècle alors que le symbolisme s’empare de différents modes d’expression. Il s’agissait en effet de la dernière conférence proposée par Mme Boulfroy qui revenait, de façon très symbolique, dans ce lycée où elle avait été élève, pour y annoncer son départ prochain à la retraite.

 

 

Grâce à un exposé très clair ponctué de différentes écoutes de mélodies françaises inspirées de poèmes célèbres – notamment L’Invitation au Voyage de Baudelaire mis en musique par Henri Duparc, la Nuit d’Etoiles de Banville mis en musique par Claude Debussy ou encore la transcription pour orchestre de ce dernier du Faune de Stéphane Mallarmé – notre conférencière nous a incités à prêter une attention toute particulière à la façon dont les musiciens faisaient leur les textes poétiques et comment ils les faisaient entendre.

 

Ce travail d’écoute attentive nous a permis de mesurer la distance entre un Debussy plutôt académique quand il met en musique le texte de Banville et un Debussy novateur quand il adopte par la suite un langage musical très différent en entrant sur le terrain de l’expérimentation aux côtés de Stéphane Mallarmé. Apparition en est un parfait exemple avec cette voix parfois presque inaudible, ces harmonies étranges et un système tonal qui semble brouillé.

 

Martine Boulfroy s’est ensuite intéressée particulièrement au Prélude à l’après-midi d’un Faune de Claude Debussy car elle souhaitait compléter la découverte faite par nos étudiants lors de leur Journée d’Intégration qui leur avait permis de visiter la Maison Natale du compositeur et de visionner quelques jours après trois versions différentes du Ballet.

Elle est ainsi revenue sur les liens à établir entre Debussy et Wagner, l’un des grands spécialistes du Prélude pour orchestre, sur l’accueil chaleureux du public mais mitigé de la critique, sur la construction d’une œuvre qui cherche la perfection du son plus que l’enchainement mélodique des accords. Avec son Faune sensuel et malicieux, Debussy nous entraîne dans un rêve harmonique où le temps semble suspendu, un univers boisé et sacré où les créatures, dont nous sommes, évoluent dans un état second à la recherche de l’absolu. Mme Boulfroy a rappelé aussi l’importance de l’adaptation de l’œuvre de Debussy pour le Ballet par Diaghilev et Nijinsky. Le ballet de 1912, véritable hommage à la culture antique,  suppose ainsi une révolution dans les postures et les correspondances avec ses danseuses musiciennes et rythmiciennes, avec un Nijinsky qui pense la danse et s’extrait totalement du réel. Mallarmé, Debussy, Nijinsky deviennent ainsi les maillons d’une chaîne prodigieuse et contribuent à créer un spectacle parfait car total où les différentes langues se mêlent en une sorte d’explosion et de feu d’artifice de la modernité.

 

Difficile de ne pas demander à Mme Boulfroy de revenir, certainement en juin, pour une (dernière?) prise de parole, justement sur les Ballets Russes!

 

Edm

Agrégée d'Espagnol CPGE Chaire Supérieure Professeure CPGE depuis 1998 Présidente PrépaMantes

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