Les optionnaires Géographie de CPGE Lettres en terrain à Nanterre

Dans le cadre de la préparation de la question de Géographie de l’ENS, « Géographie de l’alimentation », les optionnaires de géographie de la classe de khâgne se sont rendus à Nanterre le samedi 12 janvier 2019. Ils y ont retrouvé, dans le bâtiment Max Weber de l’Université de Nanterre, les optionnaires Géographie du lycée Henri IV. L’an dernier, un même type de partenariat avait eu lieu à Mantes la Jolie, au cours d’une sortie terrain intitulée « les espaces publics à Mantes-La-Jolie ».

La vingtaine d’étudiants a pu assister à une conférence de Camille Robert-Bœuf, doctorante à l’Université de Nanterre, qui a présenté ses travaux de recherche dans le cadre d’une conférence spécialement préparée pour les CPGE. Un grand merci à elle. Sa thèse s’intitule ainsi : « Les jardins collectifs : entre urbanisation de la campagne et agrarisation de la ville. Mise en regard de l’Ile-de-France et de Kazan », sous la direction de Monique Poulot.

Après un rapide déjeuner, le groupe s’est ensuite rendu sur le terrain pour voir des jardins collectifs sur le site de Nanterre. Nous avons même pu rencontrer la présidente de l’association qui nous a fait visiter les parcelles et donné des explications parfois très précises.

Sinthuya, khûbe en CPGE lettres à Mantes la Jolie, nous livre ses notes, prises lors de la conférence. Qu’elle en soit remerciée.

A bientôt pour un autre terrain géographique,

Grégoire Berche

 

L’agriculture urbaine ou comment nourrir les villes ?

Camille Robert-Bœuf.

 

Un concept qui revient bcp. Ce terme est assez récent. Connaît un boom dans les années 90. Pourquoi on parle de ça ? Des programmes de recherches, des communes qui s’y intéressent.  Des acteurs qui vont mobiliser ce concept car on a à une augmentation de la population urbaine, puisque 60% de la population mondiale sera urbaine, une baisse des ressources fossile.  Donc comment se nourrir sans passer par les scandales agroalimentaires. Elle se pose à l’échelle de villes mais d’autres échelles : micro locale, quartier, rue, pied d’arbre. L’agriculture urbaine concentré les enjeux alimentaires et son rôle dans le système alimentaire des villes.

 

1) Formes et enjeux de l’agriculture urbaine ajd. 

  • Elle touche différents domaines.
  • Une agriculture localisée en ville ou en périphérie dont les produits ou les services sociaux, tu majoritairement destinés à la ville. Elle est destinée aux urbains et se confronte à des alternatives de foncier, de l’eau ou de la main d’œuvre. Christine Aubry.
  • Un phénomène ancien, exemple des Chinampas des Aztèques au MX. Invention d’un système agricole, des radeaux avec des parcelles de terres. Des espaces productifs. En Europe, on peut penser aux jardins médicinaux et aromatiques. Il ne faut pas concevoir la ville en opposition avec l’agriculture. L’Onu estime que 800 millions de personnes la pratiquent et en vivent, 18% des ressources alimentaires.  Hanoi : 80% des légumes et 50% volailles  produits au sein des villes ou périphéries.
  • Une agriculture professionnelle et non professionnelle. Des formes variées, on ne parle pas toujours de la même chose. Comment l’agriculture urbaine peut concentrer autant de formes d’agriculture ?
  • Les enjeux du jardinage urbain : facette non professionnelle. Pq à la mode ? Car c’est au centre de plusieurs enjeux différents, d’abord environnemental en adéquation avec l’idée d’une ville verte. On améliore le cadre des vie des citadins, régulation des îlots de chaleur, augmentation de l’autonomie alimentaire des villes. Les jardins partagés sont encadrés par une charte main verte qui affirme la volonté d’être + respectueuse de l’environnement. La guerilla gardening s’apparente à une réintroduction de la nature à l’échelle, micro locale pour interpeller le citadin (mouvement créé en 1975 à NYC pour lutter contre la fermeture des jardins communautaires).
  • Enjeu social : dans les pays du Nord, on constate que l’approvisionnement des villes est compliqué. La crise de 2008 a reposé cette question. A Détroit, a fait parler et bcp de recherches.  Cela tourne autour de la food justice.
  • Sud : la question d’autonomie alimentaire ou survie, on voit le côté cyclique. En Russie, les jardins étaient e centraux dans les années 90. Dans les anneesn2010, la Russie connaît une croissance importante donc bye jardins mais les sanctions européennes ont poussé les populations à produire. Caractère adaptatif. L’agriculture urbaine revient dans les périodes de crises.
  • Enjeu politique : affirmation du rôle central du citadin citoyen dans l’aménagement des villes. La forme associative des jardins va au-delà de l’alimentation.  Vergers urbains militent pour la réintroduction d’arbre fruitier.  NOURRITURE à partager. Bcp d’initiatives viennent des associations. L’agriculture urbaine est ancienne et revendique le citadin et l’urbain comme noyau central. Elle permet de mettre en visibilité les pbs alimentaires actuels.

 

Le jardin collectif est une forme particulière de jardin, une forme ancienne.

 

Kazan, sur la Volga,  à 750 km de Moscou,  capitale de la république autonome Tatarstan. Riche et ont du pétrole.  Une ville universitaire.

 

2) Les jardins collectifs comme reflet de l’évolution du système alimentaire des villes.

 

  • Regroupement de parcelle individuel, où des familles urbaines pratiquent le jardinage pour le loisir ou améliorer leur quotidien alimentaire. Dans chaque parcelle, on a le potager et l’abri qui sont importants. C’est très important pour garder le matériel et recevoir les amis. On parle de jardins familiaux en France ou collectif de jardin / datcha en Russie. C’est un mouvement européen. On en retrouve partout en Europe, un mouvement occidental car on en trouve au Canada et EU. Des spécificités selon les pays. Ces jardins sont nés au début du 20eme pour leur répondre aux besoins des catégories sociales pauvres.  En Russie, ce sont des petites villes des quartiers. Historiquement, il y a eu des mouvements d’essor notamment dans l’entre-deux guerres comme le montre les affiches de propagande aux EU et en GB (war gardens). En France, ils se sont installés en 1896, une époque de révolution industrielle, des populations précaires qui se regroupent dans des quartiers en ville. Les bourgeois décident de créer des jardins que l’on appelait des jardins de charité pour pallier cette situation. C’est dans un courant hygiéniste et aussi un moyen de les attacher à la propriété privée face à la montée de la fièvre rouge en 1917. Pour l’abbé Lemire pensait qu’ils allaient devenir propriétaire. Il y a un déclin dans les années 50 puis retour dans les années 90. En Russie, c’est à l’initiative des populations urbaines qui « crèvent de faim » qui plantent là où ils peuvent : créé en 1917. Une période difficile. Ces jardins sont encadrés par le pouvoir central. L’Etat distribuait des terres pour les grandes entreprises.  Ce système a permis une démocratisation mais les années 90 ont mis un terme à cela. Ajd ce sont des jardins associatifs.  Ajd ils sont confrontés à une grande pression foncière. Près de 50% de la population russe a accès à un jardin.
  • Jardins familiaux : dans la première couronne de l’IDF, première ceinture maraîchère de Paris. Il s’agit d’un rayon autour de Paris où était installé des maraîchers. On retrouve des pratiques similaires : fort attachement au rendement, récupération des matériaux et déchets verts puisqu’il y a des associations de plantes. A Stains on a des cultures sous cloches. Enfin, des recherches montrent que les jardins en IDF étaient jardins maraîchers, transformation du foncier agricole en lotissement alimentaire.
  • Exemple de Nanterre : une vision urbaine. Commune rurale qui faisait partie de la ceinture maraîchère pour les vendeurs des halles. Connu pour les champignons et le lait. Un glissement vers la production agricole spécialisée. Fin du 19e, concentration sur une production facile à vendre et à haute valeur ajoutée.  Les nourrisseurs sont ceux qui s’occupaient des vaches.  A Nanterre, l’industrialisation n’a pas été synonyme d’urbanisation intensive. Urbanisation intensive avec la 2gm.  Développement des espaces verts dans des anciennes zones agricoles et près des zones inondables. Les jardins familiaux sont passés à travers cela. Ils ont été installés sur les terrains maraîchers. Les parcelles sont organisées différents ajd. Continuité de ce foncier. EX : « Ferme du bonheur » derrière le cirque, à Nanterre. Ré-appropriation du passé rural agricole pour remobiliser cela. Cela sert des enjeux environnementaux, sociaux. Les jardins collectifs sont produits pour se nourrir autrement.

 

3) Le renouveau des jardins : vers une reterritorialisation et une ré appropriation de l’alimentation par les urbains ?

  • Des personnes à la retraite qui s’installent dans les jardins car cela nécessite du temps. 79 personnes sur 200 étaient à la retraite. Des personnes issues de milieux modestes. 64 sur 100 gagnent 1300 euros et 23% -. En Russie, 27000 roubles. Soit des retraités ou sinon, des employés ou des petits fonctionnaires en fin de carrière, retraites dont le montant n’est pas élevé.  A Versailles, certains retraités ont du mal à terminer les fins de mois. En France, 62 hommes sur 100 jardiniers même si la population a tendance à se féminiser. En Russie, 74 femmes sur 100. Le fait que les jardins familiaux descendent des jardins de charité donnés pour l’ouvrier homme = Une population fragilisée dans certains contextes de crises. Le jardin est ajd une façon de s’alimenter autrement et mieux.  Faire du bio accessible. Manger de saison, on s’intéresse à comment ça pousse, comment ça marche. A partir du 1 janvier aucun pesticide n’est accepté dans les lieux agricoles non professionnels. Sensibilisation de comment ça marche : montrer comment les pommes de terre (et non les frites !) poussent, sensibiliser les jeunes générations.  Augmentation des savoir-faire et connaissances. Exemple de celui qui a fait de la permaculture. Réseaux d’interconnaissance pour trouver des terres arables etc. Alternatif qui sort des grandes enseignes. Valorisation de soi : on ré-apprend à faire des choses et acquérir un rôle et un sens dans les familles notamment en Russie.  Moyen d’intégration à l’échelle locale pour les populations immigrées.  A Epône, des Magrébins qui ne savent pas écrire et le président leur faisait les factures. Systèmes d’entraide et de sociabilité.  Une sociabilité différente, dite invisible qui ne se concrétise pas par des fêtes des jardins toutes les 3 semaines.  Ces jardins produisent une autre manière de s’alimenter, conscientiser.  Création de réseaux d’entraide, valorisation de savoir spécifique. Redéfinition des acteurs. Les jardiniers peuvent être considérés comme des acteurs de la ville.  En France, elles sont en dialogue constant avec les mairies et sont intégrés dans des associations régionales comme Jardinot. Et fédération des jardins familiaux et collectifs, héritière des ligues françaises du coin de terre et du foyer en 1896. Soit les associations deviennent membres et obtiennent des aides ponctuelles. Soit elles permettent de diminuer des coûts et avoir un discours fort à l’échelle nationale et une visibilité importante. Les maires veulent du foncier donc ils ont tendance à fermer les jardins. En Russie, on a un réseau local intégré à des fédérations nationales. Le président est député à la Douma donc il représente une grande partie de la population.  Rôle de lobbying.  Un pays autoritaire dont la population n’est pas intéressée par la politique mais manifeste en faveur de l’environnement. Défense des jardins.  Le réseau d’acteur de la ville peut être modifié et utilisé la parole habitante.  Le jeu d’acteurs fait qu’il y a un contrôle et effet de normalisation des jardins.  + : sans l’action publique il n’y aurait pas une démocratisation de l’état notamment en URSS. En 1998, l’Etat a reconnu un statut nouveau des jardins, en 2006 : amnistie de la datcha. Politique unique d’accès à la propriété. Un aspect d’aide au développement public. Mise en place d’indication obligatoire, contrôle et les jardins font partie des plans quinquennaux.  Depuis 2006, la pleine propriété permet aux gens de faire ce qu’ils veulent. 2011 : inscription comme domicile principal. En France, depuis les années 90 : revendication environnementale fait qu’il y des réglementations strictes. Effet d’esthétisation et uniformisation des jardins.  Imposer des couleurs pour les abris. Impacter les pratiques agricoles puisque ça doit être un espace de nature dans la ville = suppose pas de filet, de serre. Donc conflit avec les pratiques quotidiennes avec les jardiniers.  Interdiction des arbres ? Là ça revient : quel sens et fonction : espace productif, privé ? Même quand c’est ouvert c’est contrôlé. Un espace public privatisé. Pq les communes construisent les jardins car ils coûtent – cher que les parcs.  Dans un contexte où les communes ont – de budget cela permet de répondre aux besoins.

Conclusion : Une agriculture en contact de la ville, voire en forme de réseaux. Le rôle de ce jardinage urbain est une résilience alimentaire des populations en temps de crise, améliorer le cadre de vie, « vitrine la nature en ville », rôle d’intégration et de sociabilité, revalorisation des habitants dans le processus de fabrication de la ville. L’agriculture urbaine questionne les modes de productions alimentaires mais + largement les modes de vie des urbains qui viennent ici pour se déconnecter de la ville et du béton.

Echanges avec la salle :

  • L’aspect alimentaire est moindre mais en 2014, les sanctions européennes n’ont pas eu d’impact sur le ravitaillement des villes en Russie mais ils se sont dit que cela pouvait être important. La renaissance des potagers aux datchas
  • La polyculture dans les jardins collectifs.
  • Plats typiques issus des jardins ? pas trop car il y a la cuisine traditionnelle Russie patate choux betterave. En France, on fait + de haricots verts. Mais on peut remarquer par les plantes qui poussent l’origine des producteurs.
  • En France, on n’a pas le droit de vendre. Mais parfois ça se fait, c’est informel. En Russie cela se fait en faveur des populations en difficulté, notamment les grands-mères qui vendent une production soit disant bio. Le prix est élevé à cause de la qualité et de la rentabilité et des fleurs, notamment le 1er septembre lors de la rentrée scolaire puisque les élèves doivent apporter des fleurs aux professeurs.
  • Être résident de la commune pour être propriétaire d’un jardin.
  • Renouveau de la culture maraîchère notamment en Russie après les sanctions européennes. En IDF non, mais dans les AMAP il y a un phénomène d’augmentation.
  • Vision négative des jardins familiaux : peur qu’ils deviennent des « bidonvilles verts ».
  • + on s’éloigne de Paris + il y a des jardins familiaux.
  • Pas des jardiniers à plein temps. A Mantes-La-Ville, parcelle à la disposition d’un hôpital. Des journées de sensibilisation, lieux pour la commune.
  • Alternative : action politique. La solution foncière est politique, alternative alimentaire ce n’est pas souhaitable car c’est compliqué. Une solution parmi d’autres alternative en termes d’amélioration du cadre de vie et de la sociabilité.

Laisser un commentaire